Puisqu'enfin je suis un chameau Permettez que je vous agresse Ce qui veut dire en d'autres mots Veuillez accepter ma tendresse Comme j'ai la réputation D'irréductible peau de vache Je livre à votre discrétion Cette faiblesse que je cache Il me vient comme une douceur Il faut l'extraire, j'en ai peur Puisque me voici dans vos bras Malgré que je sois une peste Constatez que je ne mords pas Et permettez qu'ainsi je reste Si pourtant par goût personnel Vous préférez que je vous brusque C'est votre droit le plus formel Et honni soit qui s'en offusque Mais cette sorte de langueur Que vais-je en faire, quel malheur La garder, vous n'y pensez pas Je n'en ai vraiment pas l'usage Auriez-vous oublié déjà Que je me dois d'être sauvage? Vous me frôliez du bout des doigts Vous me preniez pour une brute Mais quand aujourd'hui je vous vois Dois-je penser que vous me crûtes? Mais j'y songe, cette douceur Est-ce vraiment un grand malheur? Je peux bien la cacher aussi Et l'on dira, puisque l'on cause Que nous voilà mal assortis À moins que, la plaisante chose Puisque semblable est notre lot Et qu'enfin je suis une teigne Étant vous-même un beau salaud On nous loge à la même enseigne Et s'il est question de bonheur Nous pouvons garder ma douceur Mais si je vous fais toujours peur Ne changez rien, c'est bien meilleur, meilleur