Le seul arbre qu'il connaissait
Sous sa fenêtre florissait
C'était le rustique absolu
L'homme d'un seul jardin, pas plus
Et les globe-trotters
Et les explorateurs
Coureurs de forêts vierges
Regardaient, étonnés
Ce bonhomme enchaîné
A sa tige d'asperge
Bonhomme sais-tu pas
Qu'il existe là -bas
Des forêts luxuriantes
Des forêts de Bondy
Des forêts de Gasti-
Ne et de Brocéliande?
Et l'homme répondit
Je le sais bien, pardi
Mais le diable m'emporte
Si je m'en vais chercher
Au diable ce que j'ai
Juste devant ma porte
Je n'ai vu qu'un seul arbre, un seul, mais je l'ai vu
Et je connais par cœur sa ramure touffue
Et ce tout petit bout de branche me suffit
Pour connaître une feuille, il faut toute une vie
Si l'envie vous prenait de vous pendre haut et court
Soyez gentil, ne vous pendez pas à mon arbre!
Il n'avait jamais voyagé
Plus loin que l'ombre du clocher
C'était l'autochtone absolu
L'homme d'un seul pays, pas plus
Et les globe-trotters
Et les explorateurs
Tous les gens du voyage
Regardaient étonnés
Cet être cantonné
Dans son petit village
Bonhomme sais-tu pas
Qu'il existe là -bas
Derrière tes montagnes
Des pays merveilleux
Des pays fabuleux
Des pays de cocagne
Et l'homme répondit
Je le sais bien, pardi
Mais le diable m'emporte
Si je m'en vais chercher
Au diable ce que j'ai
Juste devant ma porte
Je n'ai vu qu'un village, un seul, mais je l'ai vu
Et ses quatre maisons ont su combler ma vue
Et ce tout petit bout de monde me suffit
Pour connaître une rue, il faut toute une vie
Si l'envie vous prenait de tirer le canon
Soyez gentil, ne tirez pas sur mon village
Il n'avait jamais embrassé
Personne que sa fiancée
C'était le fidèle absolu
L'homme d'un seul amour, pas plus
Et les globe-trotters
Et les explorateurs
Friands de bagatelle
Regardaient étonnés
Ce bonhomme enchaîné
A son bout de dentelle
Bonhomme sais-tu pas
Qu'il existe là -bas
Des beautés par séquelles
Et qu'on peut sans ennui
Connaître mille nuits
De noces avec elles?
Et l'homme répondit
Je le sais bien, pardi
Mais le diable m'emporte
Si je m'en vais chercher
Loin d'ici ce que j'ai
Juste devant ma porte
Je n'ai vu qu'un amour, un seul, mais je l'ai vu
Et ce grain de beauté a su combler ma vue
Et ce tout petit bout de Vénus me suffit
Pour connaître une femme, il faut toute une vie
Si l'envie vous prenait de courir les jupons
Soyez gentil, ne courez pas après ma belle